de choses et d'autres sur le chemin des mots

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La NAPPE BLANCHE

Le 22/12/2009

 

LA NAPPE BLANCHE

 

 

Sur la nappe blanche du papier,

J'ai mis des petits mots.

 

Ils disaient tes doigts

 entrelacés aux miens,

 racontaient des bougies

 que d'un sourire  tu allumais.

 

Tu étais arrivé en retard,

 mais l'attente avait été douce.

 Enfin là, ma tendre source, 

 je venais boire à tes lèvres,

et  entre  silence et parole,

 te  mangeais aussi du regard.

 

L'idée surgit, vous frôle,

étrange magie que ces mots

qui te conviaient à ma table.

 

Mais pourtant je sais,

sans l'avoir vraiment appris,

qu'avec ces mots dansant sur le papier,

je n'en serai pas quitte avec ma faim.

 

 

Michel ASTEGIANO

 

LA RECETTE DU PETIT BONHEUR

Le 22/12/2009

 

La recette du petit bonheur

 

 

               Pour une personne :

 

Dans un premier temps

hachez menu tout ce qui pourrait vous évoquer la tristesse,

émincez regrets et soucis.

Chauffez à feu vif, pour que ça rende toute l'eau :

Il ne doit pas rester l'ombre d'une larme.

Ensuite,

dans votre cœur faites revenir  des souvenirs,

des petits,

 genre odeur de terre après la pluie,

fraicheur d'église en été,

bruit du va et vient des vagues,

danse des flammes dans la cheminée,

bruissement de feuilles sous les pieds

douceur de peau sous les lèvres,

fête de chien au rentrer.

 

Faites selon votre goût.

dans les placards de votre vie,

Je suis sûr que vous trouverez.

 

Ajoutez y :

 quelques brins d'herbe un peu folle,

une poignée de rires d'enfant,

une pincée de poudre de soleil.

Saupoudrez le tout d'amour

 et faites mijoter longtemps.

Alors,

fermez les yeux

et laissez vous bercer longtemps.

Michel ASTEGIANO

 

ABIMES ET CIMES

Le 22/12/2009

 

Abîmes et cimes

 

Alors vinrent, telle une horde de mendiants,

 ces géants taillés à la serpe du gel et du vent.

 Drapés de leurs grands haillons de pierres,

 tachés de blanc,

Ils marchent vers le ciel à pas lents.

 

Opéras immobiles et muets,

 symphonies dressées dans le temps,

 figés,    impassibles  et pourtant...

Ils sont là,    ruisselants

 en des cieux déchirés,

 de lacs en torrents

 

Alors l'homme vint. L'homme vain,

 pour une fois arrêté

 et qui s'élève, d'avoir touché  enfin

 que la vraie grandeur qui est en soi

 est dans le dérisoire qui le broie.

 

Il est là,  humble et solennel

 et caresse infiniment, elle

cette perle enfant qui frémit

 émue et tremblante

 sur son collier de vie,

 au fil rouge sang.

 

 

Alors il, dense, danse

grandit du dedans

sous ce frémissement d'elles

 renaît puis ruisselle

et pour un instant seulement

se sent libre et transparent.

 

 

 

LE BAILLY

Le 22/12/2009

 

 

Le Bailly

 

Alangui, Charles le Bailly, taillandier à Albi, bâilla. C'était l'aïoli et les anguilles du midi, qui se rappelaient à lui. Il n'avait comme alibi,  pour ce débile hoquet qui le prenait, que ce repas  entre amis : un malouin flanqué de son malinois,  un albanais vivant au Liban où il enseignait le balinais et enfin sa tendre Véro qui partageait, outre ses repas, souvent son lit à baldaquin. Elle était son béguin, la coquine qu'il lutinait souvent. Cela le turlupinait, car à être  si mutine peut-être le trompait-elle ? Me trompé-je, m'est-elle fidèle ? Telle était la question. De ses doutes il ne savait le pourquoi et en restait coi, cela le prenait surtout après le coït et le mettait en déroute et aux abois, passant ainsi de l'alléluia à l'hallali, dés la fin de leurs ébats, sitôt sorti de ses bras.

Ses débats intérieurs devinrent une habitude qui le plongeait dans l'hébétude et sans transition s'en ressentait transi, floué, affublé d'un destin grêle qui lui nouait les tripes quand ça le prenait. Cette voix de mauvais aloi trompétait sans cesse : me trompe-t-elle ? Cela le mettait à hue et à dia, il en titubait, en balbutiait, en était fort dépité et désappointé. Ce doute avait point à la saison des foins, il en avait d'abord fait fi,  essayé quelques élixirs, mais hallucinait et voyait des bêtes aux veines bleues, il se dit alors que l'alcool était vain.

Amateur de musique et d'opéra, il avait d'ailleurs tourné le dos à Rossini pour Verdi qui divertit plus, mais le charme n'opéra pas. Essaya la musique américaine, en sortit fort contrit, Carole Laure et Hardy furent sans effets, Leforestier et Marie Laforêt  ne calmèrent pas sa plainte.

Gare à ce doute qui m'étreint, qui m'éreinte, je déraille se disait l'amant en se lamentant car tant l'âme se plaint que le corps trinque.

Voulant faire foin de tout cela, il essaya un régime sans selle, crut devoir monter sur de grands chevaux à cru,  avec un palefrenier renfrogné, se retrouva perclus, mais le doute trottait toujours dans sa tête.

Ses pensées s'effilochaient fissa, envisagea la filouterie d'une filature, mais jamais ne fit ça, trouvant ça fort farfelu, ne se sentant pas assez chafouin et pour tout dire, que cela faisait freluquet. Mais la pensée d'être floué, même par un foutriquet le hantait et il ne savait comment panser cette plaie, se répétait son nom, Véronique.... Véronique.... l'itérait Véronique... Véronique.... la susnommée l'irritait et plutôt que de céder à la panique, il décida que pour la prochaine, il prêterait attention au prénom : on ne l'y reprendrait point.

 

 

Michel ASTEGIANO