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Le feu et les flammes

Le feu et les flammes

 

Ce feu là,  dans la légende avait tout d’abord pris  très  lentement, du moins c’est toujours ce que disent ceux qui la raconte.

On y ajoutera,  bien plus tard, mais ça, ce n’est peut-être qu’un embellissement, que ce fut d’abord juste aux fonds des yeux de deux amoureux que ce feu n’acquit,

que tout d’abord celui-là y était né et  que c’est comme cela que tout a commencé   pour finir en un incroyable brasier.

Au centre de l’histoire de cet incendie les deux principaux protagonistes sont deux

qui s’aimaient bien trop fort.

L’un  était, autant que l’autre l’était, complètement nu, nul n’aurait pu plus dire, ce qui faisait partie de l’un, ou bien partie de l’autre, lors de cette étreinte embrasée des amants.

Il n’y avait  là plus que des flammes qui furieusement en  heureuses et langoureuses entre elles s’enroulaient voluptueusement.

Fallait voir ça ! Toutes les couleurs y étaient, mais pas comme les demies baudruches colorées des arc en ciel.

Il y avait là, des jaunes soleils,  des mauves lavandins, des bleus saphiriques, des rouges hémoglobiniques et même des verts boréals.

Il en naissait instantanément d’elles,  des nuées d’enfants en flammèches qui aussitôt montaient tout  droit vers les profondeurs du ciel.

 

Peu à peu, sur la place impudique, une foule curieuse s’était amassée, d’abord juste intriguée et étonnée mais cependant attirée, comme celle qui vient et s’amasse autours des juin allumés des  feux de la traditionnelle  St Jean.

Mais ces deux s’aimaient bien trop, et cela devint très vite bien trop insupportable aux yeux

de cette arène de gueux.

Tout d’abord, ce ne fut qu’une légère rumeur en désapprobation, mais très vite, celle-ci enfla et terriblement gronda.

Des cris jaillirent, hurlants pour que  cesse cette cabalistique  et démoniaque passion, on a pu même y entendre, c’est dire : des vas t’en Satan !

De vieilles mères affolées, de leurs mains fripées, firent en grande hâte des bandeaux aux yeux des enfants

Alors qu’eux heureux criaient  riaient  et lançaient des encore, suivis par des plus  forts et des : c’est vraiment trop beau, mais on préféra donner des pleurs aux bambins, qui alors s’amusaient si bien.

 

Une chaine de seaux d’eau très vite s’organisa, ils passaient de main en main, animés d’une houle et de  furieux clapots.

Les trop de hâtes faisaient naître par les renversés, des marées en ruisseaux qui ruisselaient entre les granitiques pavés. Cela en jetait et encore en jetait, des flots entiers de haine liquide sur l’étreinte ardente  et si vivante des amants.

En sortilège et  incroyable diablerie, chaque flot déversé ne faisait qu’encore plus s’attiser l’amour qui là brûlait.

On  aurait pu en soupçonner un maléfice, tant c’était vain, et  même en diagnositiquer un miracle satanique, qui aurait transformé en essence toute eau sur ça versée.

Chaque tentative d’éteindre se transformait  aussitôt en  jouvence et faisait des amants redoubler la si féerique danse.

 

Mais les pompières jalousies peu à peu s’épuisèrent, fatiguées par les tant inutiles et les immensités de leurs  vacuités.

Lorsque l’aube vint, on se serait cru à Lourdes, il n’y avait  de ces sinistres pèlerins, plus qu’un cercle d’agenouillés  à terre, cul sur talons posés.

Ils formaient un anneau impeccable et silencieux sur la place située, exactement au centre du village.

Chacun regardant l’autre, hébétés, ils s’interrogeaient par regards échangés, par quoi avait elle été possédé cette nuit ? Tous se le demandaient.

Pourtant,  sur la tête de leur mère, ou bien sur les prunelles des yeux de leurs enfants, ils auraient pu tous jurer d’avoir tout vu et se dire tous être prêts à en témoigner.

Mais au centre de l’auréole, du circulaire périmètre, qu’alors ils formaient, plus rien n’était : pas  un seul tison et pas même l’ombre d’une cendre restaient.

 

Mais c’est depuis ce temps là, que dans chaque hameau, chaque bourg et chaque village, dans les hauts et les bas pays, et même dans les plaines vivrières, la première chose que l’on fait, à l’heure des bâtis :

C’est de dresser au centre,  un bassin, une fontaine, aux eaux généreuses et abondantes, pour qu’uniquement les très grands amoureux puissent se souvenir encore de cette légende...